Article publié sur le site de Valeurs Actuelles le 04 octobre 2018
L’avis favorable qu’à récemment émis le Conseil Consultatif National d’Ethique à l’ouverture de la PMA aux couples de lesbiennes et aux femmes seules nous oblige en tant qu’Antigones à revenir sur les conséquences anthropologiques d’une telle mesure.
En prévision de la révision de la loi de bioéthique, le Conseil Consultatif National d’Ethique a émis en septembre 2018 un avis favorable à l’ouverture des techniques de procréation médicalement assistée à toutes les femmes, même célibataires ou en couple homosexuel. L’universalisation de ces techniques à toutes celles (et ceux ?) disposant d’un utérus fonctionnel bouleverse l’anthropologie humaine selon laquelle la procréation est la conséquence potentielle de l’union d’un homme et d’une femme. A contrario, les techniques de procréation médicalement assistées permettent le basculement vers une anthropologie virtuelle, dans laquelle il n’est plus nécessaire pour avoir un enfant ni d’un homme, ni même d’être deux. Exit la complémentarité des sexes.
D’aucuns analysent le phénomène comme l’avènement d’une « femme augmentée ». Il nous semble au contraire que la PMA est surtout le prix de la souffrance amoureuse de nos contemporains. Conçue comme une réponse aux problèmes médicaux de stérilité des couples, elle est désormais convoitée par les lesbiennes, obligées par leur orientation sexuelle à une stérilité structurelle, et par les célibataires qui rêvent d’être mères. Même l’infécondité volontaire et structurelle doit se plier au droit à l’enfant. Ces desiderata mènent à considérer la technique comme une réponse adéquate à la souffrance humaine, de la même façon qu’on assiste aujourd’hui à la promotion systématique de l’IVG face aux grossesses non désirées, de l’euthanasie face à la souffrance des malades et des personnes âgées, ou encore de la chirurgie esthétique face aux complexes des uns et des autres.
L’ouverture de la PMA à « toutes » les femmes fait passer la génération du statut de conséquence éventuelle d’une relation homme – femme à celui de droit attaché à une subjectivité. Dans cette logique, les opposants à de telles mesures n’ont eux-mêmes plus qu’à opposer une subjectivité à une autre : droit à la vie contre droit à l’IVG, droit à un père et une mère contre la PMA pour toutes, droit de disposer de son corps contre la GPA… Au final, non seulement la PMA ne suffira jamais à combler le manque de celles qui veulent un enfant pour combler leur solitude, mais de surcroit, elle ne fera que normaliser et rendre acceptable la situation des mères célibataires pour toutes. Celle-ci ne sera en effet plus une exception à déplorer mais une conquête supplémentaire des femmes.
La PMA pour toutes n’est rien de plus que le cache-misère de la solitude croissante de femmes blessées que la souffrance pousse dans les bras de médecins et scientifiques démiurges qui ne se soucient que peu des conséquences politiques et anthropologiques des solutions qu’ils proposent à grand prix.