Article publié sur le site de Valeurs Actuelles le 25 mai 2018
Au lendemain de l’évacuation de la fac de Tolbiac, une étudiante avait revendiqué le droit des minorités non-racisées à se regrouper. Pour les Antigones, son raisonnement n’est pas totalement dénué de fond.
Ce type de courant politique, très présent aux Etats-Unis, se caractérise par son activisme politique. Il propose aux personnes « gender-fluid », non cis-genrés, racisés et autres monstres à deux têtes engendrés par notre société libérale-libertaire atomisée de se regrouper et de revendiquer pour eux-mêmes des droits qui leur sont propres. Juliette n’est que l’avant-garde de ce courant de revendications de ceux-celles, icelles, celle·e·s (?!) qui se sentent « liquides ». Étant donné l’inculture politique de nos contemporains, ce type de discours est voué à croître et multiplier : il fonde ses revendications politiques sur un ressenti subjectif, argument d’autorité du moment, et/ou des pratiques sexuelles.
Pourtant, à y regarder de plus près, Juliette marque un point : il est plus facile de parler lorsque les personnes sont regroupées selon des critères communs. Oui, l’entre-soi peut être une bonne chose ! Merci Juliette de nous le rappeler. Derrière la novlangue du propos se cache le mal-être d’une société en manque d’identité et d’appartenance communautaire. Juliette repose finalement à nouveau frais la question de la mixité forcée, du vivre-ensemble imposé qui mélange sans distinction sexes, origines, cultures, modes de vie… sous couvert de tolérance et d’ouverture. Ayant aboli les frontières au profit d’un grand marché commun et refusé toute forme d’appartenance traditionnelle comme une oppression, la société contemporaine ne reconnaît à ses membres qu’un point commun justifiant leur cohésion : leur humanité commune. Il n’est finalement que naturel que, dans ce chaos généralisé, cherchent à se recréer des groupes d’appartenance.
Si Juliette a raison lorsqu’elle explique la nécessité de groupements autour d’intérêts commun pour la réflexion, la transmission, le partage, etc., il est important de souligner que ces groupements ne peuvent en aucun cas être politiques. Le politique est ce qui unit une société et doit devenir lui-même un socle commun, ce commun qui nous manque tant aujourd’hui et dont souffrent sans pointer le mal les jeunes licornes à pois bleus non genré·e·s futurs diplômé·e·s de Tolbiac.
Si la possibilité de l’entre-soi est une condition du politique et que les groupements privés ont un intérêt certain, dans une société où le bien commun est une notion disparue, ces groupes d’appartenance privés tendent à prendre le dessus. C’est le règne du communautarisme sans identité et du « droit à » pour certains. Pour éviter un tel écueil, il est temps de reconnaître ce que nous avons de commun, ce qui fait de la nation française un peuple : une histoire, un territoire, une langue et un sang ; et de redonner ses lettres de noblesse au bien commun, seul objectif valable pour une politique ancrée dans la réalité.